La réforme du mariage civil a toutes les chances de rester comme le symbole des palinodies de François Hollande : faire une réforme, oui, faire évoluer la société, non.
Pour un homme dont le slogan de candidature était « le changement c’est maintenant », cette attitude est paradoxale. François Hollande, homme de synthèse, n’est-il pas finalement plus tenté de faire de l’amélioration par la cosmétique – on modifie la surface sans toucher au fond – plutôt que d’accompagner, voire de lancer une réforme sociétale en profondeur ?
La réforme du mariage a été lancée début septembre 2012, il y a maintenant plus de deux ans. A vrai dire, on peut même dire qu’avant même les premières prises de position par les membres du gouvernement de l’époque, Andre Vingt-Trois, cardinal de Paris, a lancé le débat par une prière lue dans les églises de France le 15 août 2012.
Le débat a duré des mois, à l’assemblée nationale, au sénat comme dans la rue. Les manifestations de soutien ou d’opposition au projet de loi ont alterné durant toute la session parlementaire 2012 -2013. L’opposition à la loi, votée de manière définitive par l’assemblée nationale le 23 avril 2013, s’est poursuivie malgré l’entrée en vigueur du texte le 18 mai de cette même année.
En parallèle, les soutiens de la réforme ont essuyé de nombreuses déceptions. En février 2014, au lendemain d’une nouvelle manifestation LMPT (La Manif Pour Tous), le gouvernement annonce le retrait d’une loi partant sur la famille. Ce texte devait « notamment aborder la question du statut du beau-parent dans les familles recomposées, des conditions de l’adoption internationale et de l’accès aux origines personnelles des personnes nées sous X et des enfants nés de procréation médicalement assistée. »
Le projet, pourtant initialement conçu comme le complément de la réforme du mariage, sera repoussé puis abandonné en rase campagne.
Vendredi 3 octobre 2014, avant veille de la grande manifestation LMPT de la rentrée, Manuel Valls, 1er ministre, annonce dans le journal La Croix que la France va lancer une grande action internationale pour éviter les dérives de la GPA (gestation pour autrui). Problème : le même Manuel Valls, alors candidat aux primaires socialistes en 2011, avait pris une position exactement contraire lors d’une interview au magazine Têtu. Ce changement de cap ne reste pas inaperçu et génère de nouvelles déceptions parmi les soutiens de cette réforme.
Les réseaux sociaux ne s’y trompent d’ailleurs pas. Les partisans de la réforme expriment leur colère et rappellent les prises de position passées alors que les adversaires du gouvernement restent sceptiques et ne viennent, finalement pas soutenir le 1er ministre.
Quel est l’intérêt de lancer une réforme qui ne résout pas tous les problèmes ? Le statut des enfants conçu à l’étranger n’est pas réglé, le statut des parents non biologiques ne l’est pas plus, certains élus continuent à refuser de célébrer des mariages entre personnes de même sexe, le statut juridique et social des personnes transgenre n’est toujours pas abordé.
Quel est l’intérêt de lancer une réforme contestée par une partie de la population si, de reculades en abandon, on finit par donner l’impression que l’opposition a raison et que cette réforme n’est en réalité pas vraiment soutenue par le pouvoir en place ?
Ménager la chèvre et le chou, se vouloir apôtre permanent de la synthèse, l’indécision est l’un des reproches majeurs qui est fait à François Hollande depuis le début de son quinquennat, et même avant. La réforme du mariage civil est l’une, sinon la seule réforme emblématique du quinquennat du second président socialiste de la Ve République. Emblématique, oui, de cette posture qui vise à avancer pour mieux s’arrêter quelques mètres plus loin, au milieu du gué.
Et, pire encore pour un décideur politique, sous les critiques et quolibets de ses soutiens comme de son opposition.