Lors de son dernier discours du l’état de l’Union en janvier, le président Barack Obama a appelé son pays à mettre en place une grosse révolution éducative : il souhaite que dorénavant, tout écolier américain suive des cours d’informatique.
La démarche est pragmatique : les Etats-Unis ont actuellement 600 000 postes non pourvus dans leur industrie high-tech et des postes bien rémunérés en plus. De plus, 90% des parents d’élèves souhaitent que leurs enfants reçoivent une éducation informatique poussée pendant leur cursus scolaire.
Le constat qui sous-tend cette proposition lourde de conséquences est simple : l’économie et la société américaine est rapidement en train de muter vers le service et l’innovation permanente. Le président souhaite que les jeunes générations soient préparées à ce monde en cours de création.
Nous avons en France une toute autre conception de l’éducation : historiquement, notre vision de ce service public consiste à former des citoyens et non des travailleurs.
Pourtant, au delà des besoins de l’économie française à disposer d’une multitude de professionnels bien formés à différents métiers de la révolution numérique pour occuper les postes d’employés, collaborateurs ou même chefs d’entreprises qu’elle génère, le projet de Barack Obama aurait aussi beaucoup de sens chez nous.
En effet, l’informatique n’est pas seulement le quotidien des professionnels du numérique. La population de notre pays:
- s’est massivement équipée d’ordinateurs pour se connecter à Internet,
- se dote actuellement d’un environnement mobile – smartphones, phablets et tablettes – pour rester connectée en permanence,
- va voir arriver dans la décennie qui vient tout un univers d’objets connectés ou intelligents qui peupleront son quotidien.
Pourtant, face à ce monde massivement informatisé, nous n’avons pas encore eu le réflexe de former les consommateurs. Les français restent majoritairement totalement incapables de comprendre les outils de plus en plus complexes qu’ils utilisent au quotidien.
Cela crée des vulnérabilités, un manque d’adaptation à une globalisation où nous rêvons encore de fabriquer des voitures alors que nous devrions concevoir les robots qui les fabriqueront.
Petite anecdote pour illustrer mon propos. J’étais il y a quelques jours chez un opérateur Télé-internet-Mobile. Une femme, devant moi, suppliait le revendeur de l’aider : son adresse mail avait été piratée et le pirate envoyait des demandes d’argent à tout son carnet d’adresse. Cette femme était de plus à la recherche d’un emploi. Son adresse email est un outil indispensable pour trouver un nouveau job. Bref, une vraie cata pour elle.
Le problème, c’est qu’elle était chez SFR-Numéricable pour demander de l’aide sur une adresse gmail. Comment lui dire que le revendeur en face d’elle, par ailleurs non informaticien, ne pouvait rien pour son cas ? Comment lui expliquer en quelques minutes qu’un mot de passe se change régulièrement ? Comment lui apprendre, durant ce cours laps de temps, tous les réflexes qu’elle devrait avoir puisqu’elle utilise tout un monde numérique dans son quotidien ? Elle n’a sans doute même pas conscience de sa dépendance aux outils numériques ni de la vulnérabilité qu’engendre son ignorance quasi-totale.
Ce sujet devrait être un des dossiers majeurs de notre gouvernement. Non seulement il est une chance de créer de nouveau des emplois en France – l’écosystème startup français est en plein boom – mais il se doit d’apprendre aux citoyen.ne.s de ce pays à vivre dans un monde largement numérisé. De plus, l’#edtech français est en pointe, ayant même l’ambition de créer certains des leaders mondiaux de ce secteur économique en pleine expansion.
Las, notre classe politique est, elle aussi, très largement ignorante de cette réalité.
Je me demande si Barack Obama ne nous rendrait pas un fier service s’il posait sa candidature à la présidentielle française de 2017.